Première page (f) Page précédente (p) Planches contact (vignettes) Page suivante (n) Dernière page (l)
23Frédéric MESSAGER.jpg

Faire des mondes
Œuvre réalisée avec le soutien de la Région Nord-Pas de Calais (Bourse d’aide à la création 2014)

Frédéric Messager
    frederic.messager@laposte.net
    59300 VALENCIENNES
    site

Frédéric Messager macule, déchire, lacère et froisse le papier. Il part de larges feuilles de papier fort – plus récemment de rouleaux de papier – sur lesquelles il répand des nappes d’encre de Chine ou d’un mélange de bitume et de térébenthine, dirigeant et contrôlant l’écoulement par des gestes amples et mesurés. Dans les plages laissées vierges, blanches, par les taches et les coulures noires, en une démarche lente, patiente et laborieuse, il dessine, en noir, des petits paysages abstraits, des mises en scène de rêves inédits. Sa démarche est à la fois gestuelle et quelque peu japonisante. Ce sont, pour lui, des paysages qu’il « développe dans une approche utopique où s’affiche l’instant de la création, sous une forme d’abandon à la production de traces, formes, signes, en tenant compte des hasards ou des déterminations qui interviennent dans la dynamique de l’exécution du dessin. » Il froisse alors rageusement la feuille pour produire des volumes informes. Il lacère ensuite, à coups de scie, les formes ainsi obtenues, les écrase, les broie, pour en révéler l’intérieur, par des brèches, par des béances presque obscènes. Devenu démiurge, l’artiste, dans un même mouvement, crée de toutes pièces sa créature puis l’éventre pour en révéler les viscères. Amour vache, amour destructeur, du créateur pour son propre ouvrage. Pygmalion assassinant sauvagement sa Galatée… Malgré toute cette violence latente, le résultat est souvent séduisant, évoquant la céramique, dans une sorte de trompe-les-sens qui se joue du spectateur et de sa perception de la pesanteur.
Son installation Faire des mondes prend une direction autre, tout en relevant de la même démarche. Il commence par photographier des lieux qui sont, pour lui, des limites, des bords, essayant d’en évacuer d’emblée toute dimension esthétisante. Dans une deuxième phase, à l’aide d’une tablette numérique, il dessine, sur certains de ses tirages, des signes et des motifs aléatoires qui brouillent l’image initiale et constituent une sorte de palimpseste aux apparences végétales. Microcosme et macrocosme s’y interpénètrent dans une forme de vertige ou de course à l’abîme.
Après impression, les dessins sont rangés dans des tiroirs en bois, posés sur des tréteaux. Le spectateur est alors invité à transgresser le tabou de l’intangibilité des œuvres exposées et à manipuler, ouvrir et fermer les caissons pour en découvrir le contenu.

LD